Propos recueillis le 31 mars 2015 lors des 4èmes Assises de la Philanthropie organisées par l’Institut Pasteur et Le Monde avec le soutien de Neuflize OBC. [Télécharger les actes de ces Assises de la Philanthropie] |
« La Fondation Bettencourt-Schueller n’est pas un guichet. Elle propose de soutenir les talents et les porteurs de projets à réaliser leur rêve à travers la construction d’une relation de confiance. Pour autant, je représente davantage la philanthropie traditionnelle. En effet, nous n’utilisons pas de plateforme participative et ne faisons pas appel à la générosité publique, notre Fondation vivant de la générosité d’une unique famille. De plus, nous ne réalisons pas d’investissements, mais des dons.
Cependant, nous tentons d’intégrer dans ces modalités classiques de pratique de la philanthropie un esprit cultivant la vraie liberté. L’esprit d’entreprise n’en est donc pas éloigné. Notre liberté réside notamment dans les moyens importants qui sont mis à notre disposition, mais elle résulte aussi de notre résolution de pratiquer notre philanthropie en restant fidèles à nos valeurs. Or, ces dernières sont essentiellement des valeurs d’entrepreneur, puisque la Fondation a été créée par une famille d’entrepreneurs.
Premièrement, nos choix sont résolument humains. En effet, les personnes, non les idées, les concepts ou les systèmes, font la différence à nos yeux. L’entreprenariat est avant tout le fait d’entrepreneurs. Par conséquent, nous identifions avec soin des leaders, des hommes visionnaires et à la force d’engagement constante.
Deuxièmement, nous privilégions le temps long. Il nous importe davantage d’agir bien que d’agir vite. Nous sommes organisés à cette fin. En effet, la structure de notre passif nous permet de nous engager à long terme, près de 80 % de nos dons sont pluriannuels et s’étalent sur cinq, dix ou vingt ans. »
« L’évaluation est nécessaire. Nous tentons d’ailleurs de l’appliquer à trois domaines : notre propre manière de travailler, qui ne doit être figée ; la bonne exécution des conventions que nous passons, celles-ci étant généralement assorties d’objectifs particuliers ; et enfin, leur impact, plus complexe à apprécier.
En outre, il existe de nombreuses écoles en matière d’évaluation. Je ne suis par exemple pas à l’aise avec le concept de SROI (social return of investment) consistant à tout traduire en euros. En effet, je doute qu’il nous aide concrètement à faire les choix nécessaires.
Quoi qu’il en soit, des progrès doivent certainement être réalisés dans le domaine de l’évaluation. Ce dernier représente un champ de développement considérable. Pour notre part, nous tentons de réaliser des études d’impact sociales de nos projets les plus importants. »
« Le montant des dons change tous les ans, mais il atteindra cinquante millions d’euros en 2015.[…]
Les structures, étroitement accompagnées et soutenues, ne risquent cependant pas de perdre leur indépendance, puisque nous dialoguons très librement avec elles. Il pourrait arriver que nous prenions une place trop importante dans leur tableau de financement, mais nous sommes vigilants sur le sujet. Nous savons apprécier de telles situations, ainsi que la présence de relais économiques, et associer nos engagements à des objectifs dans le cadre de la mise en œuvre de notre soutien. Nous faisons également preuve d’écoute et de confiance. »
Olivier Brault
Directeur général de la Fondation Bettencourt Schueller