Le livre de Yonnel Poivre-Le Lohé, De la publicité à la communication responsable nous parle d’une communication sincère, fondée sur le dialogue et le bon sens, et dont l’ambition est de contribuer à une société respectueuse des personnes et de leur environnement. Cet ouvrage, sorti il y a quelques jours aux éditions Charles Léopold Mayer et préfacé par Thierry Libaert, risque bien de devenir une référence en matière de communication responsable.
Consultant en communication et blogueur de Communication Responsable, Yonnel Poivre-Le Lohé est également membre de l’Association pour une communication plus responsable, dont LIMITE est l’un des membres fondateurs.
De la publicité à la communication responsable est un ouvrage exhaustif, à la hauteur des enjeux que le sujet soulève, qui dresse un état des lieux réaliste et sans détour de la communication et de ses pratiques.
Un secteur puissant et influent… sans avoir l’air d’y toucher
La communication, omniprésente, produit des représentations sociales, façonne les comportements, influe sur « l’état des gens », qu’il soit psychologique, social, sanitaire… Or la communication dite « classique », forte de ce pouvoir, se contente souvent de satisfaire des ROI commerciaux et ne se soucie guère de ses impacts sociaux et environnementaux. Les pratiques non éthiques sont ainsi légion, à commencer par le greenwashing (que l’auteur illustre d’études de cas, dont celui d’Areva).
À (re)lire : Le guide du greenwashing (en français) de Futerra
Une autorégulation volontairement inopérante
ARPP, CEP, CPP, JDP, UDA, AACC… Si la profession s’est « officiellement » emparée du sujet, elle rechigne depuis toujours à faire entrer dans ses instances de régulation des représentants de la société civile (consommateurs, ONG…), préférant l’entre-soi et l’opacité tranquille de l’autorégulation… pour que rien ne change vraiment.
Une vision court-termiste dans un contexte de montée en puissance des consom’acteurs et de la pubofatigue (comme en attestent itérativement les études d’opinion)…
« Si nous, communicants et publicitaires, acceptons honnêtement de rendre des comptes, nous serons mieux acceptés par la société, notre métier pourra perdurer… et prospérer. »
La communication responsable, des réformes urgentes
Des solutions existent pour réenchanter notre métier : se fier à des instances telles que l’Observatoire indépendant de la publicité, mettre en œuvre des réformes comme celles proposées par l’Association pour une communication plus responsable, telles que la création d’un Haut Conseil de la communication, sur le modèle du CSA, ou la constitution d’un fonds permettant aux campagnes d’intérêt général de bénéficier de plus de visibilité et ainsi de rééquilibrer consommation et conscience.
La communication responsable ou le bon sens près de chez nous 😉
– Ne pas se parer du masque de la perfection : l’authenticité ou l’auto-dérision rendent une marque attachante, riche de personnalité et digne de confiance. C’est l’effet « flawsome », contraction de flaw (défaut) et awesome (génial) = vos défauts vous rendent cool.
– Impliquer les clients : le levier essentiel pour la mise en œuvre d’une communication responsable est la confiance dans l’intelligence et la bienveillance des publics. Il faut que les citoyens aient un droit de regard sur ce qu’on leur vend, en mettant par exemple à leur disposition des espaces de discussion et de créativité… et progresser ainsi de concert.
– Mieux utiliser les médias : comme le dit l’auteur, le matraquage publicitaire « fonctionnait parfaitement lorsque les cibles n’avaient pas d’outil pour faire entendre leur voix et souvent leur désaccord » (au passage, communiquer responsable, c’est aussi changer de vocabulaire : « public » n’est-il pas plus respectueux et engageant que « cible » ?)
À (re)lire : Programme pour réformer globalement et radicalement les pratiques du secteur de la communication et de la publicité, par l’Association pour une communication plus responsable
Conclusion : une communication responsable est plus respectueuse et mieux calibrée, donc potentiellement plus efficace. Alors, la communication de demain sera-t-elle responsable ? Yonnel Poivre-Le Lohé reste prudent : « Il faudra des années, peut-être des décennies, avant de voir la communication responsable devenir à son tour le modèle dominant. » Pour cela, il faut trouver des alliances et des relais, et pouvoir compter sur une vraie régulation indépendante et des outils de formation pour les professionnels… et aussi, changer les mentalités : communiquer responsable, ce n’est pas un corpus de contraintes qui empêcheraient de puber en rond, c’est aussi une source de créativité renouvelée !
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