Cette étude annuelle, qui croise les déclaratifs des donateurs et des
associations avec les déclarations de don effectivement reçues par l’administration des impôts, confirme une année 2012 en croissance plus faible que l’inflation et annonce une année 2013 guère plus encourageante.
Les intentions de dons pour les Philippines des personnes que nous avons interrogées avec l’IFOP et les premières remontées de nos amis fundraisers ne sont pas de nature à infléchir cette impression. Même si, étant donnée la faiblesse de la croissance, quelques milliers de donateurs supplémentaires peuvent permettre au secteur d’éviter une stagnation ou une baisse globale de cette collecte 2013.
Sans compter que les catastrophes médiatisées comme celle-ci jouent un triple rôle pour « l’écosystème de la générosité » :
– elles sont l’occasion d’une première expérience de don pour des
milliers de personnes ;
– elles constituent des temps forts de l’expérience collective du don
et d’une maturation progressive du « corps philanthropique » de la
société ;
– elles ont, depuis le tsunami asiatique de 2005, été des
accélérateurs de la migration vers le e-don.
La livraison 2013 de l’étude pilotée par Cécile Bazin et Jacques Malet
recèle quantité d’informations et d’analyses que nous ne saurions trop
recommander à tous ceux qui scrutent la générosité de nos compatriotes
de décortiquer et de méditer avec attention.
Nous y reviendrons dans de futurs billets mais, en première lecture,
quelques points sont très en résonance avec ce que nous vivons à
l’agence :
1) Les donateurs classiques de plus de 70 ans sont moins nombreux et
augmentent moins le montant qu’ils donnent : ils compensent donc moins les
manques à gagner : cette génération pivot, sur laquelle pèsent beaucoup
des difficultés de leurs proches, reste incroyablement généreuse mais
tire un peu la langue. Elle est peut-être aussi en proie au doute
quant à la viabilité de ses valeurs et de ses convictions dans un
monde en transition…
2) Le « poids » des plus aisés (contribuables à + de 39 k€ annuels) dans
le montant global de dons tend à progresser pour atteindre aujourd’hui
64% des montants déclarés (contre 61% en 2008). Outre la réponse que
ces chiffres apportent à ceux qui considèrent que les déductions sur
les dons sont une « niche fiscale » et qui pensent pouvoir remplacer le
secteur associatif par l’Etat, ce phénomène donne raison aux
associations et fondations qui mettent le paquet sur les stratégies
« grands donateurs », « philanthropes » et « mécènes ». Même si beaucoup
d’entre elles se contentent de transposer leurs méthodes et leurs
messages « donateurs moyens » à ces publics exigeants, sans travailler
sur leur image et leurs services comme le font les banques grand
public quand elles lancent leur offre à destination des « détenteurs de
patrimoine ». Parallèlement, penser que les donateurs « moyens » sont en
baisse parce qu’ils ont des difficultés économiques ne doit pas nous
empêcher de nous poser la question des limites de la collecte de masse
qui a fait la croissance du caritatif ces dernières décennies. Y
aurait-il ici un lien avec le fait que les structures de 1 à 10
millions d’€ tirent plus leur épingle du jeu en 2012 que les plus
grosses, peut-être moins réactives ? On le vérifiera dans les 2 ou 3
années qui viennent, car plusieurs grandes associations, ONG et
fondations ont entrepris d’importants virages stratégiques courant
2013…
3) Alors que la proportion des donateurs classiques de plus de 60 ou
70 ans stagne ou baisse, celle des moins de 30 ans a augmenté de 3,6%
en 2006 à 4,1% en 2012 ! Nous avons souvent signalé ce fait que la
génération Y se distingue par sa capacité d’empathie… à condition,
ici aussi, de lui proposer une nouvelle « offre » de manières de
soutenir et de donner qui corresponde à ses logiques et à ses usages.
Certes, ils sont encore peu nombreux et peuvent peu donner, mais les
organisations qui sauront nouer une histoire avec cette génération ont
l’avenir de leur côté. Cet avenir, plus proche que certains ne le
pensent, sera forcément participatif et à plusieurs vitesses, y
compris en matière de gouvernance, numérique, nomade, en réseau avec
les autres organisations sur la même cause, voire avec d’autres
causes, hyper-transparent et critique, mouvant et en flux… et
transnational : dans notre dernier e-baromètre, 24% de ces jeunes
donateurs déclaraient avoir donné à l’étranger au cours des 12
derniers mois. La marque France s’exporte bien, y compris en matière
de non profit, alors il est temps d’y aller !
4) 3 régions représentent plus de 50% des dons. De quoi alimenter
les réflexions des communicants en matière de géolocalisation de leurs
investissements… sans oublier que, en matière de digital aussi, on
peut géolocaliser ! Et de plus en plus efficacement…
5) Le don en ligne, « espoir » selon Recherche & Solidarité.
Même si le « e-don » n’est pas ici analysé en tant que tel, le dernier
chapitre de l’étude, consacré aux nouvelles formes de don, comporte
quelques perspectives assez excitantes pour ceux qui travaillent sur
la migration digitale des communications et des collectes.
Par exemple, on y découvre que 1 donateur de 40-49 ans
sur 4 et 1 de moins de 40 ans sur 5 seraient prêts à devenir « amis »
d’une association sur Facebook.
Ou bien que les donateurs plus jeunes se plaignent du peu d’échanges
personnalisés avec les associations ou fondations qu’ils soutiennent.
Ou encore que 36% de ces mêmes jeunes donateurs se déclarent
intéressés par le microdon et 41% par les formes de don
participatives (« crowdfunding »).
Alors ? Alors à nous de lire. À nous de creuser. Et à
nous de jouer !
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