[Les activités extra-scolaires de nos consultants] Consultant chez LIMITE, David Lajarge est aussi personnellement engagé dans le combat contre l’homophobie. Il y a deux semaines, il a lancé un Tumblr à concept : jenesuispashomophobemais.tumblr.com. Et ce Tumblr s’est mis à buzzer de façon impressionnante. Une histoire qu’il nous raconte…
Genèse
Cela faisait déjà un bon moment que je ressentais le besoin de réitérer l’expérience d’une initiative personnelle en faveur de la cause LGBT (pour « les nuls » : Lesbiennes, Gay, Bi, Trans). J’avais en effet été à l’initiative d’une chanson sur le coming out en 2011 (« J’ai choisi ma danse« , chanson écrite à plusieurs mains, composée par Vincent De Azevedo, interprété par Lester Bilal; vidéoclip par Fabien Lemaire), une chanson qui avait fait du bruit dans « le milieu » mais finalement peu auprès du grand public. Un semi-échec ou une demi-victoire, c’est au choix.
Mais avec le brouhaha actuel autour de l’homosexualité, né du projet de loi sur le mariage pour tous, j’avais enfin trouvé ma fenêtre de tir idéale… Car quand on « s’excite » sur un sujet, qu’on y mêle débats et manifestations d’ampleur nationale à n’en plus finir, il y a forcément des masques qui finissent par tomber et des débordements qui voient le jour. Et il m’a suffi de fouiller un peu sur les réseaux sociaux pour en avoir la preuve. J’y ai observé une homophobie plus ou moins effrayante, sous couvert de liberté d’expression. Et visiblement, de la même façon qu’à une certaine époque (qui malheureusement ne semble pas totalement révolue) on pouvait entendre « je ne suis pas raciste mais », aujourd’hui on en arrive à « je ne suis pas homophobe mais ». Je vous laisse apprécier la subtilité de la formulation, qui suggère forcément une suite déplorable ou au moins ambiguë.
J’avais trouvé mon concept : regrouper et exposer des citations de personnes lambda ayant comme unique particularité de commencer par « je ne suis pas homophobe mais ». Ni plus, ni moins. Le contenu de chaque citation allait de toute façon largement faire le job en matière de polémique… Ah et une subtilité qui a son importance : à aucun moment n’accuser qui que ce soit d’homophobie.
Il me restait maintenant à prendre 2 décisions : où « me nourrir » en citations et quelle format de rendu/consultation adopter.
– Concernant le premier point, j’ai assez vite décidé de concentrer mes recherches sur Twitter. Pourquoi me direz-vous ? Tout simplement parce que Twitter est actuellement en pleine mutation en France, avec l’arrivée massive des adolescents et de nouveaux corps professionnels représentés. J’ai volontairement écarté Facebook (plus représentatif du grand public, c’est vrai) parce qu’entretemps une belle initiative avait vu le jour et il était hors de question pour moi de la copier ou pire de la cannibaliser : http://manifpashomophobemais.tumblr.com/
– Concernant le second point, c’est justement le Tumblr cité ci-dessus qui m’a convaincu de passer par cette plateforme de microblogging. Tout sonnait juste : Tumblr est LA plateforme par excellence des « microblogs à concept » qui font le buzz, par exemple en rebondissant sur l’actualité (http://ledebat.tumblr.com/, http://presidentlolande.tumblr.com/), en détournant la pop culture (http://peopledyinglikemarioncotillard.tumblr.com/, http://draping.tumblr.com/) ou encore en décortiquant avec humour des univers bien particuliers (les fameux Tumblr à gifs; exemples avec le Marais ou les agences de pub). Et surtout, Tumblr encourage naturellement la viralité (système de rebloging, de contribution, d’abonnement, de « j’aime », la mode des hashtags #Tumblrdujour et j’en passe). Parce que non, l’hypothèse de faire le buzz ne me gênait pas vraiment 😉
Ainsi est né le dimanche 19 janvier au soir le Tumblr http://jenesuispashomophobemais.tumblr.com/
Lancement
Lundi 20 janvier : avant de « propulser » sur la scène des internets mon Tumblr tout frais tout chaud, je me suis employé à accomplir 2 missions : proposer une première vague de contenus suffisamment intéressante et riche et sélectionner une liste d’ambassadeurs légitimes (amis, blogueurs, quelques médias LGBT), histoire d’amorcer la pompe en terme de visites et de relais qualifiés.
– Pour ce qui est du contenu et donc de repérer des tweets pertinents pour mon Tumblr, j’ai mis en place une méthodologie de veille combinant alertes automatiques et recherches live « intelligentes » en utilisant des outils gratuits comme Hootsuite, Topsy ou encore Alerti. A chaque « bon client » repéré, il me suffisait de faire une capture d’écran, et hop une publication supplémentaire !
– Pour ce qui est du choix des ambassadeurs, pour le coup c’est ma petite cuisine personnelle mais disons simplement que je n’ai pas « bêtement » envoyé l’information à tout mon carnet d’adresses et à tous les blogueurs de la Terre. Non j’ai préféré me cantonner à prévenir une petite trentaine de personnes dans mon cercle d’amis (« virtuels » ou non), sensibles au combat contre l’homophobie et quelques médias LGBT que j’apprécie sincèrement, comme Yagg. J’ai également profité de l’évènement Facebook officiel mis en place pour la manifestation « pro-mariage pour tous » du 27 janvier pour faire circuler mon Tumblr.
Il ne me restait plus qu’à attendre que la sauce prenne… ou pas ! Et à continuer de publier régulièrement pour maintenir l’intérêt autour de mon Tumblr.
Buzz
Le buzz est quelque chose de totalement imprévisible, quoi qu’on en dise. Enfin, quand on ne l’achète pas… Pourtant, on peut facilement s’accorder sur des catalyseurs naturels de buzz comme le sexe, le trash, l’incroyable, le WTF absolu. Mais voilà, prophétiser un vrai succès à l’avance, ce n’est quand même pas évident. Parce qu’au-delà d’évidences, il y a aussi tout ce qu’on ne maîtrise pas. Ou peu : le contexte (est-ce le bon moment ?), l’accueil (compréhension du concept, accueil chaleureux ou prémices d’un bad buzz ?) ou encore le pouvoir viral (une vidéo par exemple peut être bien réalisée et agréable à regarder mais ne pas du tout donner envie d’être partagée).
La chance est donc un facteur à prendre en compte. Et à accepter.
Il se trouve que de la chance, j’en ai eu… Durant toute la journée, c’est en effet une énorme vague de réactions (très positives) et de partages que j’ai pu observer à propos de mon Tumblr. Les premières statistiques étaient d’ailleurs sans appel : au moins 10.000 visites (j’ai installé le compteur tard), 860 tweets renvoyant sur l’URL, 250 abonnés et déjà quelques gros médias intéressés, comme Glamour par exemple. A ce moment-là, oui j’avais le droit de dire que j’étais en train de faire le buzz !
Et ça a continué comme ça pendant plusieurs jours. Avec des hauts… et des bas, comme cette malheureuse avalanche de twittos qui se sont « amusés » de manière indélicate avec ce fameux « je ne suis pas homophobe mais ». Véritablement mal intentionnés ou non, difficile à dire. Toujours est-il que, et c’est là qu’on constate le pouvoir des réseaux sociaux, la communauté Twitter a veillé au grain et les a rapidement pris en chasse. Très instructif !
Clôture
Il y a une règle maîtresse sur Tumblr, et il ne faut jamais l’oublier : quand un Tumblr buzze, c’est sur un laps temps très court, moins d’une semaine en général. C’est comme ça, point barre. Tumblr, c’est un peu comme un long tunnel publicitaire, il y en a tellement qu’on finit par zapper. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien qu’existe ce fameux hashtag #Tumblrdujour ! Il y a bien sûr des exceptions : les Tumblr à gifs, par exemple, semblent tirer leur épingle du jeu, de même que les Tumblr « journal intime » ou « inspirations » qui renvoient plus à des blogs classiques, et donc à une consultation traditionnelle, fidèle.
Du coup, j’ai décidé en cours de semaine que mon Tumblr serait éphémère, et qu’il fermerait ses portes très exactement 7 jours après son lancement.
C’est donc le lundi 28 janvier qu’a pris fin l’étonnante aventure http://jenesuispashomophobemais.tumblr.com/. Mais plutôt que de partir comme un voleur sans que quiconque ne comprenne pourquoi, j’ai décidé de m’y prendre autrement. Question de respect bien sûr mais pas que… Voyez par vous-même. Ma dernière publication :
Comme vous pouvez le constater, j’ai découpé ce dernier post en quatre temps :
– Clôture offielle
– Rappel des objectifs du Tumblr
– Congratulations/révélation des indicateurs de succès
– Ouverture sur « la suite » grâce à la mise en place d’une mailing list
La mailing list. En voilà une idée toute bête qu’elle est bien pour faire d’une pierre deux coups avec mon buzz ! En effet, lorsque j’aurai besoin d’un coup de pouce pour lancer une nouvelle initiative (ça viendra, croyez-moi !), je pourrai faire appel à tous celles et ceux qui se seront enregistrés pour m’aider à faire du bruit. Et on peut sans problème parler dans ce cas-ci de contacts ultra-qualifiés et réceptifs. Du pain béni !
Epilogue
Le buzz est maintenant bien retombé, c’est le moment de dresser un bilan de ma folle expérience…
Bilan chiffré tout d’abord, car ça fait toujours plaisir 😉
En 7 jours donc :
– 50 000 visites
– 425 abonnés
– 1125 tweets renvoyant sur l’URL
– Quelques grands médias relayeurs : France Info, Glamour, BFM TV…
Un bilan plus personnel maintenant…
Au-delà de ce que j’ai pu dire dans le dernier billet du Tumblr et de la fierté évidente que j’éprouve face à « tout ça », je n’en reste pas moins quelque peu déçu par une réalité simple mais révélatrice : je n’ai reçu aucune demande de suppression de post ni même de plainte de la part des twittos « incriminés » sur mon Tumblr. Et pourtant il n’était pas bien compliqué de remonter jusqu’à moi (et donc jusqu’à mon email ou mon téléphone) étant donné que je n’ai pas lancé cette initiative en anonyme et que j’en parlais de temps en temps sur mes présences sociales. Enfin bon… Quoi qu’il en soit, j’espère sincèrement avoir apporté une pierre à l’édifice du combat contre l’homophobie. Car au final, c’est la seule chose qui m’importe.
Pour terminer ce long billet (vous êtes toujours là ? ^^), je voudrais juste dire que si je devais ne retenir qu’une chose de cette expérience, ce serait qu’il faut oser se lancer.
« If you never do, you will never know », un ami a posté dernièrement cette citation sur son mur Facebook. Voilà qui résume bien là où je veux en venir. Osez vous lancer, osez tout court d’ailleurs !
Et osez avec LIMITE 😉
BRAVO!!!
Comme dirait l’autre : « Créer, c’est résister. Résister, c’est créer. » Bravo David pour ton indignation mise en action !