Richard Matthew Stallman, le père du logiciel libre, a récemment donné une conférence sur le thème « Logiciels libres et droits de l’Homme », organisée par la FIDH, Reporters sans frontières, Telecomix, Silicon Maniacs, et soutenue par LIMITE. Voici un résumé pour comprendre pourquoi droits de l’homme et logiciels libres sont indissociables !
Pour Richard Stallman, avoir le contrôle de son matériel informatique est un droit humain (comme il le confie aux Inrocks), et c’est pour cela qu’il a martelé, dès le début de son discours, la devise de l’Etat français appliquée au monde des logiciels : « Liberté, Egalité, Fraternité ». « Liberté, parce que les utilisateurs sont libres. Egalité, parce qu’ils disposent tous des mêmes libertés. Fraternité, parce que nous encourageons chacun à coopérer dans la communauté. »
Un discours qui repose sur quatre libertés fondamentales :
– liberté 0 : celle d’exécuter un programme informatique comme on le veut (utiliser un logiciel comme on le souhaite)
– liberté 1 : celle d’en modifier le code source (les lignes de code du programme informatique qui définissent ce programme)
– liberté 2 : celle de redistribuer des copies d’un programme
– liberté 3 : celle de redistribuer ses propres versions modifiées d’un programme
A partir de ces libertés fondamentales du logiciel libre, RMS présente 4 nouveaux droits de l’homme qui en découlent. Il se considère d’ailleurs lui-même comme un militant, fondateur de la Free Software Foundation, et c’est ce qui le rapproche de Reporters Sans Frontières, de la Fédération Internationale des ligues des Droits de l’Homme et plus généralement du monde des ONG.
Le logiciel libre au service des droits de l’homme
Richard Stallman est donc là pour défendre l’utilisation et la diffusion du logiciel libre tel que le système GNU (« GNU’s Not Unix ») qu’il a créé. Le principe même du logiciel libre, autodocumenté, personnalisable et extensible, en fait d’office un outil au service des ONG, cohérent avec leur positionnement. Le seul outil selon Stallman capable de contrecarrer les « malwares », des « logiciels privateurs » qui entrainent une surveillance et une mise en situation de dépendance de l’utilisateur. Les logiciels libres sont alors les premiers défenseurs de la liberté d’expression (alors que les logiciels privateurs censurent) et de la liberté d’action (alors que les logiciels privateurs surveillent) pour les ONG.
Quid de Facebook et Twitter ?
Viennent alors Facebook et Twitter, notamment utilisés lors des révolutions arabes pour organiser et mobiliser les actions des insurgés. Pour Richard Stallman, Facebook et Twitter font parti des « malwares », de même que Google, Adobe ou Skype. Il est catégorique à ce sujet. Cependant, au cours du débat qui a suivi la conférence, certains ont tout de même voulu titiller notre pape du logiciel libre en rappelant le levier qu’ils avaient pu être lors des printemps arabes et pour la démocratie. Loin de se démonter, notre « gourou » de la liberté a répondu d’un trait que « ce n’est pas parce que ces systèmes sont le mal qu’ils ne peuvent pas faire du bien ». Il a ajouté qu’il était plus facile pour ces pays d’utiliser Facebook et Twitter puisqu’ils ne disposaient pas de bureaux locaux et pouvaient donc passer outre les lois de ces pays. Ce n’est pas le cas aux Etats-Unis où l’indépendance est bien moins grande concernant ces réseaux sociaux.
L’ouverture du savoir et ses implications démocratiques
Stallman contribue depuis 30 ans à faire progresser la cause du logiciel libre avec la Free Software Foundation. Sa bataille aujourd’hui est celle de l’ouverture du savoir qui passe par la lutte contre les brevets logiciels (qui « font mal à l’informatique ») et la gestion des droits numériques. L’actualité d’ACTA (pour « Anti-Counterfeiting Trade Agreement » ou accord commercial anti-contrefaçon) a été abordée. Est enfin venue la question d’Hadopi : RMS a apporté une réponse concrète à la question de la rémunération des artistes et du financement des activités culturelles en proposant deux solutions, l’une inspirée d’une licence globale et l’autre reposant sur un système de dons simplifiés (pour en savoir plus en lisant l’article des Inrocks).
Le logiciel libre pour les députés français
Une actualité importante pour tous les citoyens français, des plus geek aux plus novices en termes de logiciels libres, est venue clôturer cette conférence : tous les députés français fraîchement élus ont jusqu’à la fin du mois de juillet pour choisir sur quel système d’exploitation ils veulent travailler. La FIDH et Richard Stallman ont ainsi conclu en encourageant fortement les citoyens que nous sommes à promouvoir le choix du logiciel libre auprès de nos députés. Ce que chacun peut faire : ici.