Aujourd’hui, vous l’avez peut-être remarqué, est un jour funeste pour l’internet. De nombreux sites sont passés, pour un temps, en noir et blanc. Une campagne de communication orchestrée par la production de The Artist ? Non. Un mouvement de protestation mondial contre la censure du web.
Essayez de faire une recherche sur Wikipedia anglais, et c’est sur l’image ci-dessus que vous allez immanquablement tomber. Un signe de protestation que l’on retrouve sous des formes différentes sur de nombreux sites et non des moindres : Google, WordPress, Greenpeace… et la liste est longue.
« PIPA, SOPA ? NOPA ! »
A l’origine d’une telle mobilisation, le vote au Sénat américain des projets de loi SOPA, pour Stop Online Privacy Act et PIPA pour PROTECT IP Act – promis, dès demain vous pourrez trouver sa définition sur Wikipédia ;). Ce projet cherche à réguler internet afin de mieux défendre les droits d’auteur. Or, les moyens qui sont mis à la disposition des ayants droit apparaissent disproportionnés.
Pour faire court (mais vous trouverez plus long chez Wikimédia), ce type de loi met en danger les plateformes où tout un chacun peut apporter du contenu, imposant pratiquement pour les éditeurs des contrôles a priori des publications sur leur site. Impossible, dans ce cas, de maintenir durablement tous les services qui fonctionnent sur la base de la collaboration des internautes… Un risque majeur pour la liberté d’expression, qui est décrié par des organisations comme l’Electronic Frontier Foundation, mais aussi un danger économique pour une grande partie de l’industrie du web, comme le clament en chœur Facebook, Yahoo ou encore Amazon.
Silence et obscurité : la métaphore des « temps sombres »
Sur le modèle des brassards que portent les Japonais lors d’une grève, voici donc le web qui se drape de noir. On retrouve un peu partout des avatars ou des homepages marqués de la couleur sombre, comme on retrouvait au moment de la marée noire du golfe du Mexique des logos de BP entachés par le pétrole. Soyons lyriques : si l’on pouvait voir de loin l’internet comme on voit la Terre depuis un satellite, sans doute pourrions-nous distinguer aujourd’hui des taches noires, qui représentent alors une sorte de tumeur pour le réseau se répandant par capillarité que dénoncent les opposants à la loi.
Mais sur internet, monde de l’écrit, le noir n’est pas seulement visuel. L’obscurité, c’est aussi le silence. Impossible de parler dans le noir, puisqu’il faut pouvoir lire. Le « blackout » de sites ou de profils sur les réseaux sociaux sont donc synonymes d’absences de prise de parole. Une journée durant, pas de notification, pas de mise à jour, pas de publication. Une « mort numérique » temporaire, comme l’avaient tentée de nombreuses stars l’année dernière pour lutter contre le sida.
Le mot d’ordre, « going black », outre la subtile référence musicale, apparaît alors comme une métaphore des « dark ages » : un retour vers un hypothétique Moyen-Age numérique, dans lequel lequel l’obscurantisme règne contre la liberté d’expression et la libre copie circulation de l’information chères aux défenseurs du Net. Un temps si reculé que certains hackers y voient même des dinosaures pointer leur nez.
Le 18/02, un voile de protestation est donc passé sur l’éclat lumineux de bon nombre de sites. Qui a dit que l’activisme numérique ne pouvait pas être poétique ? 🙂
Nicolas Danet (Twitter : @NTenad)
même Mark Zuckerberg se fend d’un post sur son profil Facebook :
http://www.facebook.com/zuck/posts/10100210345757211