Ce matin, à la Fondation Mérieux, à Annecy, le 8e Atelier des Fondations, à l’initiative du Centre Français des Fondations, s’achève par une plénière sur le thème : « Quelles perspectives pour les fondations demain ? », animée par Béatrice de Durfort (Centre français des fonds et fondations) avec Nicolas Borsinger (Fondation Pro Victimis), Benoît Miribel (Fondation Mérieux), Roxane Roger-Deneuville (WWF France et Fonds Biome) et Laurent Terrisse (Agence LIMITE).
Dans un contexte de concurrences et de sollicitations nouvelles, de crise et d’inquiétude sur les perspectives de financement et de développement de leurs ressources, les quelque 130 dirigeants et conseils de fonds et fondations se sont interrogés sur les nouveaux modèles à mettre en œuvre pour développer leur patrimoine, leurs ressources, leurs alliances, leur extension, leurs réseaux, leurs synergies avec le développement durable, leur politique de ressources humaines, la mémoire de leur histoire, leurs outils de mesure d’impact, etc.
Ayant suivi le développement des fondations en France depuis les Assises du Mécénat et de la Philanthropie de la loi Balladur, en 1987, jusqu’aux Assises de la Philanthropie et au Think Tank de l‘Institut Pasteur, en 2009 et 2011, en passant par la participation à la création et à la communication de nombreuses fondations*, Laurent Terrisse préfère parler de « big bang des fondations ». Régulièrement, un porteur de projet, un fondateur, une entreprise mécène, un créateur du social business consulte LIMITE avec une nouvelle idée sur la manière de se servir du modèle fondation pour inventer les modèles de demain, ceux qui sont à la limite entre logiques marchandes et non marchandes, entre ère pré-numérique et ère des réseaux sociaux, entre projet individuel ou entrepreneurial et intérêt général, entre investissements à court terme et impacts développement durable…
Il a fallu 15 ans, après les 1ères Assises de 1987, pour que le mécénat, notamment grâce aux efforts de l’Admical, prenne son envol ; 20 pour que l’idée de philanthropie devienne à la mode.
Les mentalités et les pratiques ont rapidement changé : montée en puissance du soutien de l’opinion au tiers secteur (confiance encore en hausse en 2011 d’après France Générosités CerPhi), internationalisation, développement de services aux mécènes et philanthropes, ISR, etc. Depuis les lois Aillagon (2003), ainsi que depuis les lois fondations nationales de recherche, fondations d’universités et de grandes écoles (2007) et fonds de dotation (2008), les choses se sont accélérées.
Un peu trop pour certains, qui préféraient l’époque du club très fermé des grandes fondations d’avant, plus lisible, plus stable, plus « entre soi ». Bien ou mal, cette époque est révolue. Les financements publics sont en diminution, favorisant un afflux de nouveaux aventuriers de la philanthropie. Il y aura des victimes de cette compétition. Mais il y a déjà aussi création de nouveaux modèles et de valeurs :
– les jeunes et le microdon,
– les philentrepreneurs,
– les entreprises du social business,
– les hybrides aux frontières du social ou de l’environnement,
– les riches qui veulent rendre à la société et s’investir personnellement,
– les entreprises qui recherchent des coopérations avec la société civile (comme l’expliquait l’ex-Directrice du Développement Durable de Carrefour, Véronique Discours-Buhot, lors de la table ronde de jeudi : « Fondations et DD »),
– Internet et la presse cherchant de nouveaux business modèles avec le mécénat de mobilisation,
– …
Dans ce « big bang », les fondations sont une lumière fixe : plus que jamais, quand tous les repères s’effondrent et que personne n’est capable de dire ce qui va se passer à
6 mois, on a besoin d’actions d’intérêt général et d’engagements de long terme. C’est exactement le boulot des fondations. A condition…
… A condition de bien définir quel type de fondation on est ou on crée :
– fondations « plateformes » à vocation d’expansion, redistributrices et donc « intrinsèquement en réseaux » comme le disait hier Dominique Lemaistre, Directrice du mécénat de la Fondation de France dans l’atelier sur les réseaux ?
– fondations « de projets » créées par des personnes, par des familles ou par des entreprises ?
– ou fondations « véhicules » pour inventer de nouveaux modèles pour de nouvelles idées ?
… A condition de construire son image vis-à-vis des publics clés et des parties prenantes en conséquence du modèle choisi, en tenant compte du fait que nous sommes désormais dans le monde de l’hypertransparence où la confidentialité et le silence peuvent être suspects.
… A condition d’adapter sa gouvernance et de l’ouvrir aux publics et aux exigences de la société numérique et des réseaux sociaux.
… A condition que le secteur des fondations et de la philanthropie apprenne à s’adresser à l’ensemble de la société pour expliquer, en mots simples, son utilité sociale et économique.
Laurent Terrisse
* Co-conception et accompagnement de la Fondation-Hôpitaux de Paris et de l’opération « pièces jaunes », des Journées de la FRM, du Pasteurdon, du Donocoeur de la FFC, et de nombreuses Fondations, associations et entreprises dans des stratégies de communication qui ont participé au développement de l’esprit philanthropique et du mécénat.