Depuis la sortie du jeu America’s Army, considéré comme le premier serious game, en 2002, le concept n’a cessé de se développer. America’s Army met en scène des opérations militaires avec un objectif marketing précis, séduire des recrues potentielles, et un objectif com’ bien rodé, redorer l’image de l’armée américaine.
A l’origine, l’expression « serious game » désigne un jeu dont le but ne se résume pas au simple divertissement mais surtout à l’éducation ou à la sensibilisation et dont le principe repose sur l’immersion du joueur. Un jeu capable de traiter de sujets sérieux et de différentes problématiques liées à la santé, la pauvreté ou encore l’éducation. Il existe donc plusieurs type de serious game, des « military games » (America’s Army en est un) aux « green games » comme Clim City qui ont pour vocation de sensibiliser aux questions environnementales, en passant par les « edugames », des jeux qui éduquent et vous apprennent à gérer votre budget par exemple (Cyber Budget).
Le concept de serious game semble pouvoir se décliner à l’infini et satisfaire à peu près tout le monde, y compris les étudiants en médecine qui désormais peuvent se faire les dents sur des « game for health »…
Le serious game est un dispositif immersif mais il est n’est pas seul sur la toile. On parle d’advergame quand il s’agit d’un dispositif immersif dont le but est purement promotionel. Magnum Pleasure Hunt, l’advergame de la célèbre marque de glaces en est l’illustration parfaite : le jeu consiste à récolter un maximum de chocolats en un temps record tout en se baladant de sites en sites. Ici, aucune problématique sociétale mise en avant et on se rend rapidement compte que les sites parcourus au cours du jeu ne sont autres que ceux des marques du groupe Unilever… L’advergame est donc une nouvelle manière de faire de la pub sans que ça en ai trop l’air.
Si le serious game a autant la cote – il alimente des blogs entiers comme celui-ci– c’est parce qu’il répond à des tendances de consommation contemporaines. Le consommateur, de plus en plus friand de personnalisation, de valorisation de son ego et de concepts participatifs, immerge dans un univers où sa personnalité déterminera le scénario du jeu.
Ajoutons que le serious game est parfaitement en adéquation avec son temps puisqu’il est pluri-médias. En effet, on y joue sur son ordinateur – directement sur Internet si on ne l’a pas téléchargé -, mais aussi sur notre smartphone. Amnesty Internationale, pour marquer ses 50 ans, vient de sortir son application iphone, Bulletproof. Un serious game pour iphone qui fait écho aux campagnes de l’ONG sur la défense des droits humains en invitant l’internaute à s’intercaler entre un peloton d’exécution et un condamné…
Coté annonceurs, les avantages que présentent les dispositifs immersifs et plus précisément les serious et advergames sont nombreux.
Les annonceurs marchands, en proposant des advergames, répondent à la publiphobie ambiante puisque ce type de jeu, grâce à leur principe immersif, ne sont plus vu comme de simples publicités. L’annonceur se démarque des campagnes et supports classiques.
Les annonceurs non marchands, eux, trouvent un moyen efficace de sensibiliser aux grandes causes un nouveau public, adepte des nouvelles technologies et parfois blazé du pathos et du ton culpabilisant de certaines campagnes. Les autres cibles ne sont pas exclues puisque le jeu video, depuis la Kinect ou la Wii, s’est immiscé dans les foyers, séduisant parents et enfants, et ne semble pas vouloir en sortir !
Le caractère ludique et pédagogique de ce nouveau support capable de joindre l’utile à l’agréable et de sensibiliser tout en divertissant, inspire de plus en plus d’ONG et défenseurs de grandes causes. United Nations World Food Programme a récemment mis en ligne un jeu, Food Force, consistant à répondre correctement à des questions pour nourrir des familles : si vous répondez correctement à une question, 10 grains de riz sont distribués à des familles en nécessité. Une manière d’aller au-delà de la simple sensibilisation et de vulgariser/démocratiser l’action humanitaire… Mais la grande ONU n’est pas la seule à exprimer sa créativité en matière de serious game. En effet, des étudiants danois, avec Third World Farmer, proposent au joueur de se glisser dans la peau d’un agriculteur de pays du Sud, confronté aux contraintes météorologiques, à une certaine précarité et surtout à la nécessité de nourrir une famille.
Alors oui ! Ils sont sérieux avec leurs serious game !
Pour info, FoodForce ne vient pas de sortir (sortie en 2005, il y a 6 ans) et consiste à rejouer les différentes étapes d’une action humanitaire (comptage de réfugiés, parachutage de vivre, modeste gestion d’un village etc) à travers différents petits jeux, et justement pas des quiz.